La Maison des Arts à Sciences Po Paris
Sciences Po Paris a ouvert une nouvelle porte ce mois-ci, sur un univers jusqu’alors assez méconnu de la discipline politique, puisqu’il s’agit de l’inauguration d’une […]
/ Sciences Po
Le « 1, Saint-Thomas », c’est le nom du nouveau campus de Sciences Po Paris. Il lui vient de sa somptueuse localisation, le plein cœur du quartier au tarif immobilier le plus élevé de la capitale, la place Saint-Thomas d’Aquin du VIIe arrondissement. De la même manière que tous les autres établissements de Sciences Po, l’appellation correspond à l’adresse. Le directeur du 1, Saint-Thomas, Mathias Vicherat, a choisi de conserver cette tradition dénominative bien que ce campus n’ait rien à voir avec les six autres sites parisiens de l’école. Le défi, pensé il y a plus de dix ans, était plus ambitieux que les précédents ; il s’agissait ici de s’implanter au centre de Paris dans un établissement de prestige du XVIIe siècle rénové en conséquence.
C’est en 1682 que les frères dominicains érigent ce bâtiment pour en faire un couvent des Jacobins. En 1770, le chantier est définitivement achevé : le noviciat, étalé sur trois hectares, accueille cinquante frères et une grande bibliothèque. Après la révolution, c’est l’armée qui s’y installe pour donner une toute autre vie à cette architecture. Devenu l’hôtel de l’Artillerie, les militaires y fabriquent leurs armes, leurs armures, et y apprennent la science atomique. Au fil des années, les locaux s’agrandissent, se transforment, et finissent par héberger les services de l’état-major puis la Sûreté militaire. Ce bâtiment aux mille et une vies est classé en 1982 au titre des Monuments historiques.
Par l’augmentation incessante du nombre d’étudiants de Sciences Po, la création d’un nouveau site s’imposait. Le chantier universitaire de l’ancien noviciat a débuté au mois de septembre 2018. L’étude du projet de rénovation a été confié au cabinet architectural de Jean-Michel Wilmotte, dont l’idée était de rafraîchir ce monument poussiéreux et fatigué sans esquinter son charme. L’architecte y a fait entrer la lumière en installant de nombreuses verrières et en conservant les voûtes. Comme dans chaque chantier, il y a eu des surprises, notamment la découverte d’un escalier du XVIIIe dont la pierre originelle était camouflée sous une épaisse couche de peinture. Cet espace s’est également tourné vers une vision écologique en favorisant des équipements de basse consommation et en y ajoutant une végétalisation conséquente. Le campus, niché entre l’église Saint-Thomas d’Aquin et plusieurs hôtels particuliers, possède maintenant deux bibliothèques, un jardin avec ses carrés de potager, une cafétéria, un pavillon, trois salons, dix salles de cours, deux salles informatiques et un espace artistique, le tout largement condensé dans 14 000 mètres carrés.
Tout cela pour un coût total de 190 millions d’euros, somme contractée d’un emprunt de 160 millions d’euros et de fonds propres de 30 millions d’euros. Le remboursement devrait s’étaler sur 30 ans, et Mathias Vicherat compte notamment sur les appels à projet de recherche et sur les élus locaux pour y parvenir.
L’inauguration de cette université comparable à certains campus américains a eu lieu le 28 janvier dernier, remplissant de fierté les participants du projet qui fêtaient en même temps les 150 ans de Sciences Po. L’ambition du 1, Saint-Thomas est à l’échelle de l’histoire de cet institut ; c’est la consécration de la prospérité d’une grande famille. Avec l’arrivée du printemps, il s’agit maintenant de voir comment les étudiants vont s’approprier ce lieu empreint de lumière.