Doit-on autoriser l’utilisation d’internet pendant le Bac ?

Préparation Bac

À l’ère du numérique, l’intégration d’Internet dans les processus éducatifs est devenue une réalité incontournable : de nombreux cours s’appuient sur des recherches effectuées par les élèves sur le web, de l’école élémentaire au lycée. Mais les épreuves écrites du Baccalauréat restent encore en France exemptes de toute intrusion des technologies numériques. Ce rite de passage académique conserve pour l’instant une règle simple : les connaissances requises sont dans la mémoire et le cerveau du candidat et aucune aide externe n’est permise. À l’heure où certains pays franchissent le pas, est-il temps d’autoriser l’utilisation d’Internet pendant le Bac en France ?

Des pays ouvrent les portes à internet pendant le Bac

Malgré la résistance du monde éducatif dans la plus grande partie de l’Europe, certains pays ont déjà franchi le pas vers une pratique moderne autorisant l’accès à Internet pendant le Bac.

Le Danemark est le premier à s’ouvrir aux examens 2.0

Voici plus de dix ans que le Danemark expérimente l’utilisation d’internet pendant des épreuves du Bac. C’est en 2007 que 14 lycées danois ont commencé à tester ce principe pour certaines épreuves : le danois, les mathématiques et les sciences sociales. Souvent cité comme précurseur dans l’adoption de méthodes d’éducation innovantes, le Royaume nordique en a tiré une conclusion très positive. Un rapport d’évaluation a en effet mis en évidence l’avis quasi unanime des enseignants et des étudiants : tous se réjouissent de la hausse qualitative des résultats et par effet rebond, d’une augmentation de la qualité des cours.

Les raisons pour lesquelles le Danemark a décidé de changer les règles des épreuves sont simples : l’éducation s’y veut proche du monde « réel ». Comme l’explique un chercheur d’un institut de pédagogie danois, l’épreuve « traditionnelle, où les étudiants sont assis pendant des heures dans une pièce, isolés du reste du monde, est complètement artificielle ». Selon lui, l’idéal pour tester leurs aptitudes est de les placer dans une situation aussi proche que possible de la réalité, c’est-à-dire en leur autorisant l’accès au web. Dans ce pays scandinave où les téléphones portables sont autorisés au lycée depuis 2000, les élèves peuvent venir avec leurs cours et leurs livres aux épreuves.

Une autre approche de l’éducation préside au choix danois

L’idée est d’évaluer non pas la connaissance mémorielle de textes, de notions et de dates, mais les capacités cognitives et les compétences des élèves à comprendre, vérifier et traiter des informations pour atteindre des objectifs. Fini le bachotage, place à l’intelligence. En contrepartie, le niveau des exigences est plus élevé.

Cette approche n’est évidemment pas exempte de défis : la surveillance des examens doit être méticuleusement conçue pour détecter et prévenir la triche. Les étudiants doivent utiliser Internet comme un outil de recherche et non comme un moyen de fraude. Comment les autorités éducatives s’y prennent-elles ? Un responsable pédagogique explique que « le plus important concernant la triche, c’est de dire à nos étudiants que ce n’est pas bien de tricher, que la fraude a des conséquences graves, et que nous avons un logiciel anti plagiat ». Là encore, le pays semble parier sur l’intelligence et sur la raison des élèves. Les danois vont d’ailleurs être rapidement rejoints par l’Angleterre, elle aussi en phase d’expérimentation.

Pourquoi la France refuse-t-elle l’accès à internet pendant le Bac ?

Le système éducatif français valorise grandement les épreuves de fin d’année du Baccalauréat, traditionnellement associé au bachotage et au stress des révisions du bac trop souvent effectuées à la dernière minute. À l’inverse de nos voisins européens, il semble que donner l’accès à internet pendant certaines sessions d’examen se heurte à de fortes résistances culturelles.

L’argument central des nombreux détracteurs d’une telle mesure est le risque de fraude. Un accès illimité à l’information que l’on trouve sur la toile, les élèves pourraient être tentés de commettre de la triche ou du plagiat au détriment du contrôle des connaissances et de l’équité entre tous les candidats. De plus, la surveillance deviendrait un défi colossal. Cet argument a d’autant plus de poids depuis qu’est apparu ChatGPT et d’autres logiciels d’intelligence artificielle conversationnelle. Comment reconnaître un travail sous-traité à l’IA ? Ou comment éviter le recours à de telles pratiques ? La question fait sens.

Par ailleurs, le Bac est un examen qui est censé évaluer la connaissance en soi, mais aussi la qualité du raisonnement et des capacités cognitives. Un accès libre à Internet pendant le Bac risquerait de déplacer l’accent mis sur l’apprentissage par cœur vers une compétence moins valorisée dans le système actuel : l’évaluation, le croisement et l’utilisation à bon escient des informations disponibles. Bien que cette compétence soit essentielle à l’ère du numérique, sa mesure n’est pas encore intégrée dans la méthodologie des épreuves classiques du Baccalauréat comme le Bac de Français et les épreuves finales, bien qu’elle le soit en partie dans la préparation du Grand oral du Bac.

Ainsi les témoignages des professeurs semblent aller dans le même sens. Les uns remarquent que de nombreux élèves ont des problèmes de lecture. Comme une épreuve du Bac demande d’aller vite, internet ne pourrait rien pour eux. D’autres s’en tiennent au principe du Bac : « il vise à contrôler ce qu’a appris l’élève », « il doit rester très généraliste et davantage axé sur les connaissances que sur les compétences intrinsèques ».

Sans compter la difficulté d’assurer matériellement l’équité de tous les candidats dans une logistique complexe. Cela exigerait que les salles d’examen soient toutes équipées d’ordinateurs. L’Éducation nationale en a-t-elle aujourd’hui les moyens ? Mais toutes ces justifications sont-elles encore justifiées en 2023 ?

Connaissances ou compétences, que doit apprendre l’école ?

L’éducation a longtemps été centrée sur l’apprentissage de connaissances, le bachotage étant une pratique répandue, en particulier pour la préparation des examens. Mais à l’ère du numérique omniprésent dans nos vies, nous sommes en droit de nous interroger : quel est le rôle d’une école du 21e siècle ? S’agit-il uniquement de dispenser des connaissances, ou doit-elle plus ouvertement aider les élèves à développer leur sens critique, l’utilisation d’informations pertinentes et la capacité de construire des raisonnements solides et argumentés

La vision traditionnelle d’une école du savoir est-elle encore justifiée ?

La vision traditionnelle de l’école comme un lieu de transmission de connaissances reste profondément ancrée dans notre système éducatif. Certes, des progrès ont été réalisés dans la pédagogie plus interactive et l’on ne peut contester l’impératif absolu de maîtriser un certain nombre de notions et de savoirs. Toutefois, il n’est pas rare que l’évaluation se concentre sur cette seule conception du savoir et cette approche est maintenant remise en question.

Certains éducateurs s’interrogent sur la pertinence de continuer à interdire l’utilisation d’Internet pendant le Bac, arguant que cela pourrait encourager un enseignement plus centré sur la compréhension et la pratique moderne. Pourtant, cette idée soulève des inquiétudes quant à la fraude, la triche et le plagiat, qui pourraient potentiellement devenir plus faciles avec un accès ouvert à Internet. Les épreuves traditionnelles du Bac sont conçues pour évaluer les connaissances acquises, pas nécessairement la capacité de l’élève à utiliser ces connaissances dans un contexte pratique.

Vers une approche plus compréhensive ?

Or certains spécialistes penchent désormais pour une approche plus compréhensive. C’est le cas de Claude Lelièvre, historien de l’éducation, pour qui : « à notre époque, il est important d’évaluer les élèves sur leur capacité à traiter rapidement les informations à leur disposition ». Il s’insurge contre le blocage actuel : « Je n’ai jamais compris pourquoi un certain nombre d’outils que l’on utilise au quotidien sont supprimés au moment des examens. Nous ne sommes pas des machines. » Il n’est pas seul à plaider en ce sens. Est-il indispensable de retenir toutes les formules mathématiques ou physiques, qui seront oubliées six mois plus tard et que l’on peut trouver sur n’importe quel site de confiance ? Cette obsession d’un contrôle des connaissances étroit ne freine-t-elle pas l’épanouissement des capacités de raisonnement ?

Rien de tel n’est aujourd’hui prévu. Pour autant, la France pourra-t-elle rester dans cette position intransigeante ? N’est-il pas temps de commencer à introduire, pour certaines épreuves, l’assistance du web ? Et de travailler sérieusement à trouver des parades aux tentations d’utiliser des intelligences artificielles en ligne ? Car si nos voisins danois et anglais se sont lancés dans cette nouvelle voie, leur expertise peut nous aider à construire, nous aussi, une approche éducative plus en phase avec une société qui vit avec internet.

En attendant, sachez que si vous souhaitez vous préparer aux exigences du Baccalauréat français, Cours Thalès propose des stages de préparation au bac, dans une ambiance de bienveillante exigence, à chaque période de vacances scolaire de Première et de Terminale.

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