La pénurie de professeurs plane sur la rentrée scolaire 2024-2025
La rentrée scolaire 2024-2025 a-t-elle vu un enseignant devant chaque classe ? Sans vouloir divulgâcher ce beau suspens, voici un indicateur parlant : cette année, nul […]
L’instauration des groupes de niveau au collège, décidée au dernier trimestre 2023, doit entrer en application dès le mois de septembre 2024. Elle a suscité de nombreux débats parmi les acteurs de l’éducation, avec une tonalité souvent critique. Présentée comme une arme pour améliorer les performances académiques des élèves, la réforme soulève des questions à propos de ses effets sur le système éducatif. Sera-t-elle un moteur d’inégalités sociales ? Ou, comme l’imagine un enseignant dans une chronique sur le journal Le Point, une vraie chance pour les bons élèves de quartiers populaires ?
La réforme des groupes de niveau a été initiée par l’Éducation nationale en réponse aux mauvais résultats obtenus par la France aux évaluations PISA de 2023. Le recul significatif dans la compréhension de l’écrit et sur les mathématiques a placé une nouvelle fois la France au 23e rang sur 38 pays de l’OCDE. Pour faire face à ce score médiocre, l’idée d’instaurer des groupes de niveau, déjà mise en application voici une cinquantaine d’années puis, sporadiquement, dans certains cas, a semblé intéressante.
La réforme initiale prévoit l’organisation de groupes de niveaux flexibles en mathématiques et en français tout au long du collège : environ un tiers des heures de cours seront dispensées en groupes de niveaux, constitués sur les besoins identifiés par les professeurs. Le reste des cours auront lieu en formation de classe complète. C’est d’ailleurs sur le principe de classes hétérogènes que notre système éducatif repose. Il est prévu de constituer des groupes de 15 élèves dont les savoirs doivent être renforcés au maximum. Le groupe des élèves sans difficulté pourra atteindre la taille d’une classe normale, soit 30 élèves en moyenne.
La mise en place des groupes de niveau suscite des préoccupations quant à la suffisance des moyens alloués. Sur les 2300 équivalents temps plein (ETP) annoncés, 1500 proviennent de la suppression d’une heure justement consacrée au renforcement qui sera de facto supprimée. Avec ces moyens, seuls 20 % des collèges au mieux bénéficieront de ressources supplémentaires. Il est donc très vraisemblable que cette réforme s’applique essentiellement aux collèges de zones d’éducation prioritaire.
S’ils sont rares, certains enseignants ont mis en avant un effet potentiellement positif de la réforme. Il permettrait d’aider, voire de « sauver », les bons élèves issus des quartiers populaires, un euphémisme pour ne pas parler de quartiers défavorisés. Cela les positionnerait sur une bonne trajectoire. Ces voix ne manquent pas d’arguments.
Les groupes de niveau offriraient aux bons élèves des quartiers populaires un environnement dans lequel les attentes scolaires sont élevées. Ils seraient ainsi encouragés à se surpasser, stimulés et portés par le groupe. La dynamique du groupe les incitera à atteindre de meilleurs résultats.
Les groupes de niveau créent des classes plus homogènes en termes de compétences académiques. En général, les élèves les plus perturbateurs sont également ceux qui ont les moins bons résultats scolaires. On peut ainsi s’attendre à des ambiances plus propices aux apprentissages dans les groupes qui maîtrisent leur matière.
Être placé dans un groupe de bon niveau contribue à renforcer la confiance en soi. Se voir reconnaître pour ses capacités et être entouré de pairs performants peut encourager les bons élèves de milieux défavorisés à se sentir reconnus et à se permettre d’avoir de l’ambition pour leur avenir.
L’avalanche de critiques à l’énoncé de la réforme n’était sans doute pas uniquement une réaction conservatrice d’enseignants déjà usés par une succession continue de réformes. En effet, des études publiées dans des revues scientifiques ainsi que de nombreuses expérimentations sur le terrain ont mis en avant de nombreux défauts des groupes de niveau.
Les groupes de niveau, selon la majorité des chercheurs, sont plutôt efficaces pour aider les bons élèves à améliorer encore leurs résultats, mais inutiles et même nuisibles pour les collégiens aux savoirs plus fragiles. Faudrait-il quand même les mettre en place pour les bons élèves ? L’idée que cette réforme pourrait « sauver » les bons élèves des quartiers populaires interroge par ce qu’elle ne dit pas.
Cette idée sous-entend que ces élèves ont besoin de secours en raison de leur environnement. Cela peut être perçu comme une forme de condescendance, renforçant l’idée que les élèves de ces quartiers sont dans une situation inférieure. Cette perception est stigmatisante et renforce les stéréotypes négatifs associés aux quartiers populaires. Et si l’on « sauve » les « bons », alors qu’advient-il des autres ? Clairement, on les laisse à leur « funeste » destin…
L’idée de « sauver » les bons élèves par des groupes de niveau ignore également les causes profondes des inégalités scolaires : le manque de ressources, un soutien insuffisant et des contextes socio-économiques défavorables. Les groupes de niveau ne résolvent pas ces problèmes systémiques et risquent au contraire de les exacerber.
Une solution individualiste à l’encontre des fondements du système scolaire. Les experts s’accordent sur le fait que les « bons » et « moyens » élèves ne rencontrent pas de réelles difficultés. L’école, le collège et le lycée ont pour mission d’amener les classes d’élèves à la maîtrise d’un socle de connaissances commun. Tous ensemble. Le principe de classes hétérogènes a longtemps fait ses preuves.
Ce sont le manque de moyens, les classes surchargées et une médiocre mixité sociale dans les établissements qui dévalorisent aujourd’hui l’éducation nationale. Au lieu de sauver des élèves qui n’ont pas besoin de l’être, c’est sans doute notre système scolaire qu’il faudrait commencer à « sauver ».
Au Cours Thalès nous regroupons les élèves en petits groupes lors de nos stages en lycée afin d’accorder un maximum de temps à chacun et d’approfondir toutes les notions.