La pénurie de professeurs plane sur la rentrée scolaire 2024-2025
La rentrée scolaire 2024-2025 a-t-elle vu un enseignant devant chaque classe ? Sans vouloir divulgâcher ce beau suspens, voici un indicateur parlant : cette année, nul […]
Mal-être, déscolarisation, tentatives de suicide, issues dramatiques… Les élèves victimes de harcèlement scolaire en sortent rarement indemnes. Et ce fléau semble prendre de l’ampleur, en particulier à cause des réseaux sociaux. Le gouvernement a lancé en 2021 un plan de lutte qui s’est progressivement étoffé depuis. C’est dans ce cadre qu’au mois de novembre 2023, tous les élèves du CE2 à la Terminale ont rempli un questionnaire sur le sujet. À cette occasion, nous vous proposons un état des lieux du problème.
Le harcèlement scolaire est une réalité complexe et dévastatrice qui affecte de nombreux élèves dans les collèges et lycées. Sur 12 millions d’élèves scolarisés de la maternelle à la Terminale, 700 000 en seraient victimes chaque année selon l’UNICEF, soit environ 6 %. Pire, une étude de l’IFOP avançait des chiffres plus impressionnants encore. Un jeune sur cinq dit avoir vécu une situation de harcèlement : dans la cour de récréation (94 %), les couloirs (83 %), la classe (60 %), la cantine (60 %) ou en sport (58 %).
Le harcèlement scolaire se manifeste lorsque des élèves sont victimes d’insultes, de menaces, de violences physiques ou de messages injurieux de manière répétitive. Ces actes peuvent se dérouler dans l’enceinte de l’établissement scolaire ou par du cyberharcèlement sur les réseaux sociaux.
Trois caractéristiques principales définissent le harcèlement en milieu scolaire :
À l’origine du harcèlement scolaire, on trouve tous types de « différences » qui vont être stigmatisées : l’apparence physique, le sexe, l’identité de genre, l’orientation sexuelle, un handicap, des troubles de communication, ou l’appartenance à un groupe social ou culturel spécifique.
Avec la montée en puissance des réseaux sociaux, le harcèlement a pris une nouvelle dimension : le cyberharcèlement. Il permet aux agresseurs de cibler leurs victimes 24 heures sur 24 et même pendant les vacances scolaires, rendant la détection et la prévention des faits encore plus complexes. Les messages haineux, les rumeurs et la diffusion d’images humiliantes sur les réseaux sociaux contribuent à un environnement toxique pour les victimes, exacerbant le sentiment d’isolement et de détresse.
Les conséquences du harcèlement scolaire sont souvent graves et peuvent inclure le décrochage scolaire, l’anxiété, la dépression, la somatisation et dans les cas les plus tragiques, des comportements autodestructeurs pouvant aller jusqu’au suicide. Les victimes peuvent éprouver un sentiment de honte, une perte d’estime de soi, des difficultés relationnelles et des comportements d’évitement. Non traitées, ces conséquences peuvent persister à l’âge adulte, affectant le développement psychologique et social des individus.
Face aux conséquences dramatiques du harcèlement scolaire et de son développement, un programme de prévention et de lutte a été mis en place dès 2021. Il a ensuite été renforcé et complété par de nouvelles initiatives, les dernières remontant à la rentrée 2023.
Le programme pHARe de lutte contre le harcèlement en milieu scolaire vise à créer un environnement sûr et accueillant pour tous les élèves. Il repose sur 8 piliers :
Fort de 400 référents académiques et départementaux, ce programme a déjà permis d’améliorer significativement la prise en charge des cas de harcèlement, grâce notamment au numéro unique 3018 pour les signalements.
À la rentrée 2023, des mesures supplémentaires ont été introduites pour renforcer la lutte contre le harcèlement dans les écoles, collèges et lycées. On y trouve, en particulier :
Un décret du 16 août 2023 renforce également le pouvoir des directeurs d’école et des chefs d’établissement dans la gestion du harcèlement.
En novembre 2023, dans la perspective de mesurer l’ampleur du phénomène et d’attirer l’attention des élèves, deux heures de « temps banalisé » ont été consacrées à la question du harcèlement dans tous les établissements scolaires et dans toutes les classes du CE2 à la Terminale. Une heure était dédiée à une sensibilisation au problème, suivie d’une heure pour remplir un questionnaire.
Le questionnaire sur le harcèlement distribué aux élèves français se composait de différentes versions adaptées selon le niveau scolaire : élémentaire, collège et lycée. La structure était cependant identique, quel que soit le niveau. En élémentaire, il comportait une trentaine de questions, contre près de cinquante au collège et au lycée. Chaque question incitait à cocher une case, soit oui/non, soit un chiffre de 1 à 4 (jamais, parfois, souvent, très souvent) correspondant au vécu des élèves face à des situations précises. Chaque questionnaire comprenait une série de questions réparties en quatre catégories principales.
Les questionnaires sur le harcèlement, une fois remplis, ont été remis aux enseignants et analysés au niveau de chaque établissement. Cela donne aux directeurs, principaux et proviseurs une bonne connaissance de l’état du harcèlement dans la structure qu’ils dirigent et la mesure des moyens à mettre en œuvre pour le combattre.
Cette démarche, soutenue par des spécialistes comme le pédopsychiatre Marcel Rufo ou le pédagogue Éric Debarbieux, vise plus précisément plusieurs objectifs :
Le questionnaire, non obligatoire et anonyme, peut permettre à un élève harcelé de mieux comprendre ce qu’il vit. La démarche de sensibilisation peut ainsi l’amener à en parler. Le questionnaire et son contexte sont donc un moyen d’identifier les élèves victimes ou témoins de harcèlement, que ce soit au sein de l’établissement scolaire, sur les réseaux sociaux ou ailleurs.
Comprendre l’impact du harcèlement sur le bien-être général des élèves et sur le climat scolaire.
La connaissance fine de l’état du harcèlement dans un établissement permet d’orienter les actions de prévention, les programmes de sensibilisation et les stratégies de prise en charge.
La transmission au rectorat de la synthèse des réponses aux questionnaires des établissements permet de disposer à l’échelon national de données quantitatives pour mesurer l’étendue du phénomène et évaluer l’efficacité des mesures prises. Les questionnaires sont conservés jusqu’à la fin de l’année scolaire.
Malgré l’importance de ces questionnaires sur le harcèlement et des mesures annoncées dans le pHARe, des experts et des représentants syndicaux soulignent la nécessité d’aller plus loin.
Pour renforcer la lutte contre le harcèlement scolaire, plusieurs pistes peuvent être envisagées. Certaines sont déjà dans le train de mesures avancées dans le programme pHARe, mais non encore mises en œuvre ou généralisées. Les conditions de réussite du combat contre le harcèlement passent nécessairement par :
La prise de conscience est bien là et les mesures qui sont déjà entrées en vigueur semblent prometteuses. Il faut maintenant que ces mesures concrètes soient accompagnées de moyens suffisants, en particulier pour former les personnels et les parents. L’implication de tous n’aura d’efficacité que si chacun peut reconnaître des signes de harcèlement et les moyens d’y remédier aussi bien dans les établissements scolaires que dans les familles.