Les prépas commerciales en péril ?

Prépas Commerciales

Depuis des décennies, les Classes Préparatoires aux Grandes Écoles de commerce constituent un passage indispensable pour les étudiants souhaitant intégrer les études supérieures en commerce et en gestion. Cependant, depuis trois ans, une baisse des inscriptions dans ces prépas commerciales a été observée. La conséquence directe est également une baisse des candidats aux concours des grandes écoles de commerce. Que se passe-t-il avec les prépas commerciales, pourquoi ce reflux des effectifs dans des filières prestigieuses ? Voici les premières pistes d’explication de ce phénomène.

Les prépas commerciales en plein désarroi

Le rôle et le fonctionnement des prépas commerciales

Les prépas commerciales, ou Classes Préparatoires aux Grandes Écoles (CPGE) de commerce, sont des formations de deux ans. On y accède juste après le Baccalauréat pour se préparer aux concours d’entrée dans les grandes écoles de commerce. Elles sont reconnues pour leur enseignement rigoureux et la densité de leur programme. Les matières principales dans ces prépas commerciales incluent les mathématiques, l’économie et les langues.

L’Éducation nationale a toujours soutenu ces classes préparatoires au même titre que les autres CPGE. Il s’agit en effet de filières d’excellence dont le rôle est majeur dans la formation des futurs cadres du monde des affaires.

Des chiffres en berne depuis trois ans

Des prépas commerciales bien implantées, mais moins d’étudiants

Aujourd’hui, on compte en France métropolitaine des Classes Préparatoires aux Grandes Écoles de commerce dans près de 400 lycées. Jusqu’en 2021, les candidats pouvaient choisir une voie économique ou une voie scientifique, selon leur parcours au lycée.

La suppression des filières scientifiques, littéraires et économiques et l’instauration d’un tronc commun de la seconde à la terminale a modifié cet état des choses : il existe désormais une voie « générale » englobant les parcours « classiques », complétée d’une voie technologique dévolue aux bacheliers STMG de bon niveau.

On comptait en 2022 81 200 étudiants dans une Classe Préparatoire (qu’elle soit à orientation économique et commerciale, littéraire ou scientifique). En deux ans, de 2020 à 2022, le nombre global des étudiants a diminué de 4 %. Mais c’est surtout la filière économique et commerciale qui semble avoir « décroché » : près de 8 % d’étudiants en moins en deux ans, une baisse importante et inquiétante dont la poursuite est attendue en 2023-2024.

Dans le même mouvement, et tout aussi inquiétant, dans l’ensemble des classes préparatoires, le nombre de femmes a diminué, et ce, une fois encore, principalement dans la filière économie et commerce (-9 %).

Les candidats aux grandes écoles de commerce également en diminution sensible

Par un simple effet mécanique, moins d’étudiants en prépas commerciales dès 2021-2022, ce sont moins de candidats aux grandes écoles de commerce deux ans plus tard.

Les deux grands concours aux principales écoles de commerce, à savoir la BCE (Banque commune d’épreuves) et Ecricrome enregistrent pour la première fois depuis longtemps une baisse des inscrits aux concours de près de 8 %. Ici aussi, le phénomène est plus marqué chez les femmes, en recul de 12 %.

Les raisons de la baisse de fréquentation des prépas commerciales

La réforme du lycée en première ligne : le mauvais sort des mathématiques

La réforme du lycée et le choix des spécialités en Première et Terminale sont des éléments très impactant dans la préparation aux prépas commerciales. Plus précisément, les mathématiques sont devenues une matière optionnelle que l’on peut choisir ou non pour continuer sa scolarité dans le second cycle.

Le premier résultat est une chute drastique du nombre d’heures de mathématiques en Première et Terminale. Entre 2019 et 2020, première année de mise en place de la réforme, le nombre d’heures de mathématiques enseigné a diminué de 18 % ! Dans la même période, le nombre d’heures d’histoire-géographie a augmenté de 14 % et celui de physique-chimie de près de 2 %.

Cette relative désaffection a touché majoritairement les jeunes femmes. En un an, leur proportion parmi les élèves de Terminale ayant au moins trois heures de cours de mathématiques par semaine est passée de 53 % à 47 %. Pire, plus le nombre d’heures de mathématiques augmente dans le cursus, plus le pourcentage de femmes s’écroule. Alors qu’un an auparavant elles représentaient 41 % des élèves suivant plus de 8 heures de mathématiques hebdomadaires en terminale, un an plus tard, leur proportion est tombée à 31 %.

On comprend ainsi qu’avec moins de formation mathématique et un algorithme Parcoursup toujours aussi opaque, le nombre de candidat. e. s aux prépas commerciales, dont les mathématiques sont une matière centrale, soit en baisse.

De nouvelles formations post-Bac rendent également moins attractives les prépas commerciales

On a vu apparaître depuis plusieurs années des propositions attractives de formation en économie et commerce ou même des passerelles permettant d’intégrer ces écoles. Si celles-ci ne prétendent pas rivaliser avec des diplômes de grande école, elles permettent plus facilement et rapidement l’accès à des professions valorisées et des parcours professionnels prometteurs.

Les bachelors des grandes écoles de commerce.

Dans un mouvement parallèle, de nouvelles formations se sont développées, dont certaines proposées par les écoles les plus prestigieuses.

Les bachelors, formations en trois, ou parfois en quatre ans, sont ainsi proposés par les grandes écoles de commerce. Elles se concentrent sur la gestion et le commerce, sont plus accessibles et moins intensives que les prépas commerciales, quoique d’une excellente qualité. Ce format attire de nombreux étudiants, car il cumule de nombreux avantages :

  • Une durée relativement courte et une formation directement accessible après le bac ;
  • Une forte employabilité, d’autant que le label d’une grande école de commerce sur un tel diplôme est un « plus » sur un CV.

Les BTS et DUT en gestion et commerce

Les BTS (Brevets de Technicien Supérieur) et DUT (Diplômes Universitaires de Technologie) en gestion et commerce sont des formations en deux ans qui permettent une insertion professionnelle rapide. Elles attirent également des étudiants cherchant des alternatives aux prépas commerciales.

L’admission en grande école de commerce par d’autres voies que le concours d’entrée après une prépa

Les écoles de commerce ont développé ces dernières années des voies d’admission alternatives aux concours traditionnels. Des passerelles permettent à certains étudiants disposant d’un BTS, d’un Bachelor ou d’un BUT, ayant suivi un parcours universitaire, ou titulaire d’un diplôme à l’étranger d’intégrer une école. Cela peut se faire sur simple analyse de leur dossier ou par le jeu d’un grand oral. Ils intègrent ainsi l’école en 2e ou 3e année.

Ces voies sont de plus en plus prisées par les étudiants. Elles permettent d’éviter la pression et le bachotage pour préparer un concours aux résultats aléatoires. Elles confèrent aussi aux candidats passant par des passerelles une certaine maturité, puisqu’ils ont déjà effectué des études supérieures, voire exploré d’autres expériences.

Un bachotage insupportable ?

Les prépas commerciales sont également critiquées pour le volume de travail intense qu’elles exigent. Ce sont souvent deux années où les étudiants peinent à « voir le jour » tant les programmes sont fournis et les professeurs exigeants.

On sait que les années de pandémie du Covid-19 ont fortement modifié la vision du travail et de l’essentiel dans la société, et tout particulièrement chez les plus jeunes. Il est ainsi possible qu’un nombre croissant d’étudiants ne supportent plus une telle charge de travail pour un but qui peut avoir perdu de son sens.

Quelles solutions pour que les prépas commerciales retrouvent leur dynamique ?

Au vu des chiffres et des alternatives aux classes préparatoires aux grandes écoles de commerce, on peut s’interroger sur une éventuelle inéluctabilité de leur déclin. Il est cependant beaucoup trop tôt pour porter un jugement définitif sur une situation de déstabilisation liée en grande partie à une modification brutale des conditions d’accès en CPGE.

Modifier les choix de spécialité et la place des mathématiques ?

Il apparaît de plus en plus clairement que la réforme du lycée et du bac initiée en 2020 produit de nombreux dysfonctionnements :

  • Problèmes de recrutement dans le supérieur,
  • Frustrations des candidats n’ayant pas choisi la ou les bonne. s spécialité. s, et ne pouvant prétendre à la formation convoitée,
  • Désertion des classes de Terminale au troisième trimestre,
  • Ou encore coup porté à la philosophie.

On peut attendre du ministère de l’Éducation nationale une révision rapide de l’ensemble du dispositif actuellement en place. Il serait certainement judicieux, en particulier, de revoir la place des mathématiques dans l’enseignement secondaire et d’encourager cette matière.

La question de quotas de femmes en classes préparatoires est également à l’étude et pourrait permettre de rétablir une certaine égalité actuellement très menacée.

Une réforme des prépas commerciales ?

Il paraît également important d’adapter les programmes des Classes Préparatoires aux Grandes Écoles de commerce pour qu’ils soient en phase avec les attentes des étudiants d’aujourd’hui. Cela peut inclure une diversification des matières enseignées, une autre pédagogie, voire une réduction de la charge de travail.

Une meilleure coopération entre prépas et écoles

Établir des partenariats solides entre les prépas commerciales et les écoles de commerce pourrait améliorer également la situation. Il est peut-être temps de penser autrement les concours d’entrée dans les grandes écoles : matières, sujets, connaissances requises, compétences extrascolaires ; qu’attend-on aujourd’hui d’un diplômé d’une grande école de commerce ?

On pourrait ainsi envisager les classes prépas autrement que comme des usines à bachotage. En introduisant plus de « pratique » et d’ouverture sur les « soft skills », ces compétences comportementales si demandées aujourd’hui dans le monde de l’entreprise, les études préparatoires pourraient attirer plus de candidat. e. s tout en correspondant mieux aux attentes des écoles, des étudiants et du monde du travail.

Continuer à développer des passerelles

La sélection très stricte des classes préparatoires comme des grandes écoles a peut-être fait son temps ? On s’aperçoit dans certains secteurs d’une désaffection réelle de candidatures au point de chercher de nouvelles voies d’accès aux métiers concernés. C’est le cas des études de médecine, pour lesquelles les passerelles se multiplient, évitant le passage par un concours de plus en plus décrié.

Un étudiant, aujourd’hui, peut se découvrir une passion ou un fort intérêt pour un secteur d’activité quelques années après le Bac. Prendre son parcours initial en compte et lui permettre de s’orienter vers une grande école de commerce par exemple permet :

  • Au candidat d’intégrer une formation de qualité et de poursuivre les études qui le mèneront à pratiquer sa passion ;
  • Aux écoles de recruter des profils d’étudiants plus variés, enrichissant ainsi un vivier de personnalités atypiques, répondant mieux aux demandes de la société contemporaine et de ses pratiques professionnelles.

En somme, les prépas commerciales, qui ont longtemps été un pilier de l’éducation dans le domaine du commerce en France, font face à de nombreux défis. L’évolution des attentes des étudiants, les changements dans l’enseignement secondaire et l’émergence de nouvelles formations concourent à cette situation. Les prépas commerciales ont toujours leur place dans le paysage pédagogique français, en tant que filière d’excellence. Toutefois, elles doivent s’adapter pour continuer à être un choix attractif et pertinent pour les étudiants ambitieux. La formation de la prochaine génération de cadres en dépend.

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